Rupture conventionnelle : n’oubliez pas la petite enveloppe avant la sortie

Date janvier 30, 2020

Nous avons déjà exposé ici notre appréciation sur l’un des volets de la loi de transformation de la fonction publique du 6 aout 2019 ; le recrutement d’agents contractuels, qui sera favorisé, au détriment – on en doute guère – des fonctionnaires titulaires. Un autre volet de cette loi concerne le dispositif d’accompagnement au changement, et notamment la rupture conventionnelle et l’extension de l’allocation chômage aux agents démissionnaires.

Ce nouveau dispositif, mis en place de manière expérimentale jusqu’au 31 décembre 2025 est censé favoriser la reconversion professionnelle des agents, en ajoutant à des indemnités versées la possibilité de bénéficier d’allocations chômage. Sur le papier, encore une fois, tout cela parait bien aller dans le sens de notre nouveau monde, de « l’univers renouvelé », comme l’a qualifié notre nouvelle Secrétaire générale lors des vœux des ministres aux agents. On y voit poindre la notion de « flexi-agent public », qui va passer habilement du secteur public au secteur privé, dans un monde d’opportunités et de chasse aux talents. Nous vous proposons ici une fiche technique décrivant le nouveau dispositif et ses bases juridiques (lire ici) Nous formons le vœu que ces nouveaux dispositifs donnent plus de souplesse dans le traitement des situations d’agents publics qui souhaitent quitter l’Administration, mais il est légitime d’exprimer quelques inquiétudes dans la mise en œuvre à venir de ces outils :

o D’abord, la réforme introduit une négociation du montant de l’indemnité, à la différence de l’indemnité volontaire pour reconversion professionnelle, à barème fixe qui, elle, va disparaitre au 30 juin 2020. A savoir, à ce titre, que pour un agent qui souhaite créer son entreprise, le montant de l’indemnité pourra être plus de deux fois moindre que dans l’ancien système, en fonction du résultat de la négociation. Quel progrès…

o D’autre part, comment se fera, à situation identique, la détermination du montant versé ? Quels critères objectifs seront appliqués pour déterminer le montant de l’indemnité ? On arrivera fatalement à des modulations de montants entre un agent fragilisé qui souhaite partir à tout prix (pour raisons personnelles, professionnelles, psychiques, etc) et un agent non fragilisé qui a l’avantage de pouvoir monnayer sans pression son départ.

o S’agissant des indemnités chômage, l’agent devra bien s’assurer, s’il y a droit, des montants qu’il percevra ; un travail d’information devra être fait sur le sujet car c’est une variable essentielle dans le calcul économique global mesurant l’intérêt de la mise en œuvre de la mesure.

o Enfin, si le dispositif repose sur un accord entre les deux parties, il faut savoir également que l’initiative de mise en œuvre de la rupture conventionnelle pourra relever de l’Administration. N’utilisera-t-elle pas cette facilité pour « suggérer » à un agent en situation « délicate » (non affecté, par exemple, comme il y en a à Bercy), de quitter ses fonctions ? Bref, un outil utilisé dans une stratégie de pression qui dénature, voire dévoie l’objectif initial affiché.

Voici tout un ensemble de problématiques et de questionnements à avoir, et il en existe sans aucun doute d’autres. La CFE CGC est confiante dans la mise en place de cette nouvelle réforme mais restera vigilante, et ne manquera pas de dénoncer, s’il le faut, les manquements ou les dévoiements du dispositif que nous serions amenés à constater. Notre syndicat est prêt à vous accompagner dans toute démarche de mise en œuvre de cette indemnité pour votre cas personnel.

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Complément : Arrêté du 6 février 2020 fixant les modèles de convention de rupture conventionnelle prévus par le décret n° 2019-1593 du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique (lire ici)

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